Le recours mardi à l’arme constitutionnelle du 49-3 par Manuel Valls a provoqué un séisme politique dont on n’a pas fini de mesurer les répliques. Il a encore trempé la détermination des opposants au texte de réforme du Code du travail.
Le dépôt d’une motion de censure a échoué d’un cheveu, provoquant une crise sans précédent. « L’utilisation du 49-3 pour faire adopter une loi rejetée par 74% de la population est inadmissible, une véritable honte ! », a protesté la CGT. « Cette décision ne vient que s’ajouter à un processus anti-démocratique depuis le début. Faut-il rappeler la non-consultation des organisations syndicales avant l’écriture du texte, les rencontres éclair avec la ministre du Travail, le blocage des votes à l’Assemblée nationale ? « , interroge la CGT.
De fait, du côté de la contestation sociale, dès ce mardi, la mobilisation pour le retrait du projet de loi Travail va connaître une nouvelle séquence malgré l’adoption au forceps du projet en première lecture à l’Assemblée. Les composantes de l’intersyndicale (CGT, FO, FSU, Solidaires, l’UNEF, l’UNL et FIDL) ont appelé leurs organisations syndicales respectives à « construire » deux nouvelles journées de grèves et manifestations les 17 et 19 mai.
En dépit de la brutalité antidémocratique et de la surdité sociale du gouvernement « les salariés sont décidés à s’engager dans un mouvement dur », assurait récemment Philippe Martinez, le secrétaire général de la CGT. Pour preuve, les grèves reconductibles prévues chez les routiers, dockers, marins, facteurs, à la SNCF ainsi qu’à Aéroports de Paris, des professions ou des entreprises où le rejet de la loi Travail se combine avec des revendications propres à chaque secteur.
- Les routiers ouvriront l’agenda social de la semaine dans la nuit de lundi à mardi, à l’appel des fédérations FO et CGT. Les salariés des transports seront particulièrement impactés par la diminution du taux de majoration des heures supplémentaires si la loi est adoptée.
- A la RATP, le préavis déposé par la CGT concerne la journée de mardi.
- A la SNCF, la CGT-Cheminots appelle à cesser le travail chaque mercredi et jeudi, et SUD-Rail tous les jours à partir de mardi pour dénoncer la loi El Khomri, et peser dans les négociations en cours sur leurs conditions de travail.
- Dans les transports aériens, des débrayages sont prévus dès mardi à Aéroports de Paris à l’appel de la CGT notamment, tandis qu’une grève sera lancée jeudi dans le contrôle aérien par l’Usac-CGT.
- La Fédération nationale des syndicats maritimes CGT a invité ses syndicats à mener des « actions fortes » en opposition au projet de loi Travail, notamment par des grèves reconductibles ou illimitées, à partir de mardi.
- La CGT des Ports et Docks a prévu « deux arrêts de travail de 24 heures », mardi et jeudi, « en réponse à l’utilisation du 49-3 », une « basse manœuvre » et « un mépris pour les travailleurs en lutte ».
- Dans la pétrochimie, les syndicats CGT ont décidé d’appeler au blocage progressif des produits pétroliers dans les raffineries, sites aéroportuaires et dépôts à compter de mardi, en laissant aux salariés le choix des formes d’actions. Ils appellent à la tenue d’assemblées générales vendredi 20 mai pour décider des suites et mettent en garde contre la probable mise à l’arrêt des huit raffineries françaises.
Dans les rues, cette semaine sera aussi marquée par des manifestations partout dans le pays. A Paris, mardi à 14 heures la manifestation démarrera place de l’Ecole militaire en direction de Sèvres-Babylone tandis que la ministre du Travail Myriam El Khomri sera auditionnée par la Commission des Affaires sociales.
Nouvelles manifestations prévues dès jeudi. A Paris, le cortège défilera cette fois de Nation à place d’Italie. L’enjeu de ces deux journées est de doper, élargir et pérenniser le mouvement social car le parcours législatif de ce texte contesté dans la rue par les syndicats de salariés n’est pas encore terminé.
Il devra encore être débattu du 13 au 24 juin au Sénat pour un vote le 28, avant un nouvel aller-retour entre les deux Chambres et une adoption définitive fin juillet. Pour autant, il faut se souvenir que même adoptée, la contestation sociale pourra encore faire reculer l’exécutif comme ce fut le cas pour le CPE.